Jean Louis Cohen – Architecture, modernité, modernisation

Je me souviens très bien de cette leçon au Collège de France. J’en suis sortie, dois-je le dire un peu sonné. Avant ce jour, je n’avais pas eu la possibilité de voir et d’écouter Jean Louis Cohen. Je ne le connaissais que par ses œuvres écrites et par ses expositions. Je connaissais bien sa grande érudition et ses travaux de recherche et il me tardait de l’écouter. Sans surprise, ce fut un grand moment.

En une petite heure seulement, quel foisonnement, quelle densité scientifique et historique fut offerte au public venu l’écouter religieusement. Il tenait bien la distance tout au long de son discours, ce fut impressionnant.

Pour en revenir à l’ouvrage qui a pour principale qualité de mettre par écrit une leçon à la concentration qui pouvait faire tourner la tête. C’est donc avec plaisir que j’ai pu lire ce qui m’a été présenté 3 ans plus tôt.

Petit aparté, 3 ans, cela peut paraitre beaucoup, mais c’est aussi très souvent le temps de l’édition.

Je retrouve toute la fabuleuse densité du propos, et l’érudition du personnage à travers cet ouvrage. Je retrouve aussi et bien souvent mes pertes de repères déjà ressentis dans cette accumulation de savoir qui parfois me laisse perplexe et m’impressionne constamment dès que j’y re-tourne (les pages).

Le grand avantage de l’avoir à sous la forme d’un écrit, c’est de pouvoir prendre le temps d’intégrer l’information, de la digérer et de la faire sienne. Un autre avantage de ce format, c’est aussi une décomposition en petits chapitres comme autant d’amuse-bouches que l’on peut prendre au grès de la lecture et qui donne un peu de respirations à ce très dense ouvrage.

Cette richesse qui bien souvent laisse sur la faim, m’a d’ailleurs permis de redécouvrir des auteurs et des personnages de l’histoire de l’urbanisme et de l’architecture. En particulier Gaston Bardet et « La ville en Grappe » qui m’a permis de relire et d’étudier d’autres auteurs qui compteront dans mes recherches comme Marcel Poëte, mais aussi le Builder français Jaques Riboud (Développement urbain – Recherche d’un principe, 1965) qui écrira sur ce même sujet quelques années plus tard.

Ce qui est fascinant, c’est la manière dont il créer des liens entre les mouvements, les acteurs et les productions littéraires et architecturales. Il donne une impression de se perdre et pourtant, il retombe toujours sur ses pieds et dénoue la pelote de ses idées sans être inquiété.

Il s’agit surtout d’une leçon inaugurale avec la limite du temps imposé par l’exercice, il ne peut donc se poser très longtemps sur quelques points de son discours. C’est peut-être l’un des seuls reproches que je ferais, et surtout à l’ouvrage. Car il n’offre alors qu’une retranscription fidèle de sa leçon et non une version augmentée que j’aurais pu escompter, surtout après 3 ans d’attente. Une attente qui n’en fut pas réellement une puisque le Collège de France offre toujours une version filmée et audio des conférences. Mais c’est aussi la raison de cette collection, rien d’autre et c’est déjà beaucoup. Il faut voir cet exercice comme des petites occasions que l’on prendrait à la volée et que l’on nourrirait par nos propres expériences et nos futures recherches.

Bref, l’ouvrage pourrait paraitre cher à l’acquisition au regard de ce qu’il représente : une retranscription d’une conférence accessible ailleurs sur les réseaux, il ne l’est pas tant que cela au regard de son très riche contenu.

Cet ouvrage ne sera peut-être pas vu comme une nouveauté indispensable pour celui qui connait le travail de Jean Louis Cohen et son importante production scientifique. Mais pour les autres, c’est une excellente introduction pour entrer dans le monde très fécond du célèbre historien.

Pour voir et revoir cette leçon inaugurale en vidéo sur le site du Collège de France. (https://www.college-de-france.fr/site/jean-louis-cohen/inaugural-lecture-2014-05-21-17h00.htm).

Un extrait de l’ouvrage existe aussi sur Openedition : https://books.openedition.org/cdf/4870. et en version numérique Kindle pour moins de 5 €

J.-L. Cohen, Architecture, modernité, modernisation, Fayard, 2017.

A propos Calosci Loup

Géographe et Architecte de Formation et actuellement doctorant en Architecture à l'ENSAPLV & Paris Sorbonne 1.

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