Le sujet de la thèse :
Concevoir la ville nouvelle aux États-Unis (1960 – 2000). Une enquête sur les circulations internationales des modèles urbains, architecturaux et paysagers : L’exemple de Columbia et Reston.
La thèse de doctorat propose un nouveau regard sur la ville nouvelle de la seconde moitié du XXe siècle à nos jours au travers des aspects théoriques, politiques et architecturaux qui l’ont façonnée.
J’explore comment les « modèles » se déplacent d’un pays à l’autre, d’une culture à l’autre et comment ils sont accueillis, modifiés et adaptés. L’objectif de cette thèse est de faire la lumière sur les réseaux internationaux, sur les échanges et les dynamiques professionnels et comment ils sont introduits dans ses nouveaux programmes urbains..
Je revisite les villes nouvelles, étudiées au prisme des transferts de modèles urbains, dans une perspective transculturelle l’histoire de la formation des villes nouvelles américaines et européennes et notamment françaises. Je tente de donner une nouvelle approche de la formation, de l’évolution morphologique et urbaine de la ville et d’expliquer leur évolution urbaine autour de nouveaux paradigmes urbains.
Dans le cadre de cette recherche transnationale dans la mise en œuvre de villes nouvelles aux États-Unis et en Europe, j’étudie principalement plusieurs cas situés de part et d’autre de l’Atlantique. Le cas de deux New Communities américaines : Reston, située dans l’État de Virginie et fondée par Robert E. Simon en 1961 et Columbia située dans l’État du Maryland et fondée par James W. Rouse en 1964. Puis Cergy-Pontoise située dans le département de l’Oise en France et un cas en Finlande à Tapiola, petite ville nouvelle fondée par Heikki Von Hertzen en 1951.
Reston et Columbia sont nés de la vision utopique de leurs deux fondateurs idéalistes, innovateurs et ambitieux, qui partagent des objectifs sociaux et urbains audacieux. À la fin des années 1960, aux États-Unis et en Europe, le concept d’une nouvelle communauté répondait à l’isolement du logement en banlieue et prescrivait un nouveau type de vie urbaine. Reston et Columbia rompirent avec le modèle traditionnel de la métropole en suggérant une ville moins imposante, plus humaine et plus verte. Ces villes engloberaient également des possibilités d’emploi et, au lieu de la ségrégation, favoriseraient la diversité raciale et socio-économique, ce qui suggérerait de nouveaux programmes et de nouvelles méthodes de modernisation du logement.
À la fin des années 1960, aux États-Unis et en Europe, le concept d’une nouvelle communauté répondait à l’isolement du logement en banlieue et prescrivait un nouveau type de vie urbaine. Reston et Columbia rompirent avec le modèle traditionnel de la métropole en suggérant une ville moins imposante, plus humaine et plus verte. Chacune des villes étudiées dans le cadre de cette thèse devient alors, une forme de laboratoire cherchant à s’extraire de l’expérience précédente tout en évitant les écueils passés.
Ma recherche se focalise notamment autour de la représentation et la médiatisation scientifique de ces villes nouvelles en Europe et aux États-Unis. Mais aussi sur les réseaux comme vecteurs d’échange et de sociabilité personnelle et professionnelle des acteurs des villes nouvelles. Puis les outils du projet de la ville nouvelle autour de la notion englobante de communauté. Une recherche transnationale en cours, autour des quatre identités centrales de ces nouvelles urbanités que sont : L’école, comme élément fondamental de la communauté nouvelle tant par sa situation au sein de la ville que par son architecture, à la fois vectrice d’innovations et initiateur d’une nouvelle société. Le centre commercial, au cœur de la vie communautaire et de son économie, sa place est majeure tant du point de vue urbain que socio économique et connais depuis les années cinquante, de profonde transformation tant du point de vue des usages que par son architecture. L’unité de voisinage, concept d’urbanisme développé au cours des années trente par Clarence Perry souvent indissociable de l’école et du centre commercial, qui est sont à la fois les pivots géographiques et sociaux économiques. Un concept qui bien qu’ayant connu de nombreuses évolutions ces dernières décennies, est encore au centre de la réflexion urbaine et le développement de ces nouvelles communautés. Enfin à une tout autre échelle, celui de l’organisation urbaine, morphologique et architecturale du paysage urbain (Urban design) et son environnement naturel dont le plan d’eau, serait au centre.
Les villes nouvelles ne sont pas une production urbaine récente. Elles sont le produit de phénomènes urbains apparus tout au long des étapes de l’évolution de l’histoire urbaine, comme une alternative aux autres formes de villes. Né avec la révolution industrielle, ce phénomène a suscité une très grande attention dans les recherches d’histoire de la ville et les théories urbaines à partir de la fin du XIXe siècle. Ainsi, le terme de « ville nouvelle » en France, ou de New Town dans le monde anglophone, s’est imposé dans le milieu de la recherche en tant que définition générale de ce phénomène. Or, comme le reconnaissent Pierre Merlin et Claude Chaline dans leurs ouvrages respectifs sur les villes nouvelles, cette notion est ambiguë, car tout au long de l’histoire de la production de ce phénomène urbain on rencontre peu d’exemples similaires entre les différentes conceptions urbaines à travers le monde. Ces différences sont généralement d’ordre urbanistique : taille des villes, groupement, localisation, aménagement interne, types d’habitat prédominant, classes de population, nature du maître d’ouvrage. Mais plus encore, c’est la diversité des objectifs et des principes qui ont présidé à la conception de ces villes nouvelles qui est surprenante. Bien qu’il puisse y avoir des volontés publiques ou privées, ainsi que des contextes politiques et socio-économiques différents, les modèles et les concepts s’échangent et se nourrissent des expériences urbaines et conceptuelles plus ou moins abouties de chaque côté de l’atlantique. Comme Claude Chaline l’écrit dans son ouvrage « Les villes nouvelles dans le monde » (1985) :
« […] par delà sa dimension strictement urbaine, le thème de la ville nouvelle révèle une grande richesse conceptuelle. Il est un bon révélateur des idéologies dominant une société, il éclaire les types de relations existant entre le pouvoir et les citoyens usagers, il atteste des options lourdes prises en matière de modèle de développement économique et social ».
Aujourd’hui, des milliers d’agglomérations à travers le monde peuvent se définir comme nouvelles si l’on s’en tient au cadre strict de la définition largement répandue tout au long du XXe siècle. Cette caractérisation se joue sur deux conditions, soit du fait qu’elles n’existaient pas auparavant, soit que la mutation qui les a affectées atteigne une telle ampleur que rien ne subsiste du passé. Par ailleurs, historiquement et majoritairement, les villes nouvelles ont très souvent été une affaire d’État comme en France ou des pays à l’économie planifiée comme les pays de l’ex-URSS. Au contraire, aux États-Unis, l’anecdotique engagement des pouvoirs publics en matière d’urbanisation ne signifie pas l’absence totale de villes nouvelles. Bien que le phénomène de suburbanisation aux États-Unis et en Europe ait pris un essor important dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, c’est aussi à cette période que des expériences urbaines issues largement d’initiatives privées aux États-Unis ont été mises en œuvre pour répondre aux nombreuses critiques faites au phénomène de l’étalement urbain et notamment au développement des grands ensembles.
Aujourd’hui ces villes nouvelles, aux États-Unis comme en Europe retrouvent un regains d’intérêts par les politiques publiques et des chercheurs qui entreprennent de nouveaux à explorer ces nouvelles communautés, tant par leurs aspects novateurs de leurs architectures et de leur urbanisme que pour le message d’intégration socio-économique et raciale.
Ces villes nouvelles se trouvent alors sur une double perspective. Entre un processus de protection globale de son passé tant par les idéaux qui furent projetés sur elles que leur architecture et leur urbanisme à l’image de ses devancières du début du XXe siècle aux États-Unis et en Europe. Et leur développement économique et urbain à travers de nouveaux programmes architecturaux et urbains ambitieux qui ne vient plus seulement s’inscrire autour des ses villes nouvelles, mais s’intégrer directement en leur sein. Pour mieux comprendre les cheminements de la pensée urbaine et son empreinte sur le territoire urbain depuis les entrepreneurs utopistes du XIXe siècle, aux mouvements du nouvel urbanisme, en passant par le mouvement moderne dominé par les CIAM et le post-modernisme.
Pour plus d’informations sur mon sujet de thèse :
Voir mon CV en ligne ou sur Linkedin et sur le site de l’UMR AUSser